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Urgence sanitaire et droit international

 

par

Michèle Poulain

Ingénieur d'études au CNRS

 

 

Résumé : Les situations d’urgence sanitaire sont de plus en plus potentiellement internationales. Cette caractéristique fait des plus graves d’entre elles une menace à la paix et à la sécurité internationales. Cette menace a été constatée, en ce qui concerne le VIH/sida, par le Conseil de sécurité qui, renouvelant sa problématique, est passé d’une conception strictement militaire du maintien de la paix à une conception pluraliste, intégrant d’autres facteurs, notamment la sécurité humaine. Cette nouvelle approche favorise l’éclosion d’une dynamique tant dans le système onusien qu’au dehors. Par ailleurs, émerge une culture collective de l’urgence à travers les éléments d’une solidarité sanitaire mondiale et ceux d’une « exception sanitaire ». La première donne à la santé valeur de bien commun de l’humanité et repose sur une coopération au sein de laquelle les acteurs non étatiques s’affirment de plus en plus. La seconde permet, en ce qui concerne l’accès aux médicaments, le passage de l’intérêt de quelques uns à un intérêt général bien compris.

Abstract : Situations of sanitary urgency tend to have more and more chances to grow international. Therefore are the most serious cases turned into a threat to international peace and security. Concerning the HIV/AIDS, this threat was noticed by the Security Council which renewed its problematics and changed its strictly military notion of peacekeeping for a pluralistic one, taking other factors, notably human security, into account. This new approach favours the appearance of a dynamics in the UN system as well as outside. Furthermore, a collective emergency culture is taking shape through the components of a global sanitary solidarity and those of a “sanitary exception”. The first ones give health the value of a common humanity’s possession and rest on a cooperation which attests the growing presence of non-governmental actors. Regarding the access to medicines, the second ones allow a well-understood general interest to replace the old interest of a very few.

 

Impression et citations : Seule la version au format PDF fait référence.

 

 


« Le fléau n’est pas à la mesure de l’homme,

on se dit donc que le fléau est irréel, c’est un mauvais rêve qui va passer.

Mais il ne passe pas toujours et, de mauvais rêve en mauvais rêve,

ce sont les hommes qui passent ».
Albert Camus, la Peste


 

Nul doute que l’année 2001 ne demeure sur bien des plans une année extraordinaire, au sens étymologique du terme : en dehors de l’ordinaire. Terrorisme, catastrophes naturelles et/ou nées de l’activité des hommes, conflits, drames humanitaires et sanitaires, l’énumération des faits nationaux ou internationaux cause un malaise profond que ne viennent dissiper que de rares lumières. Les avancées récentes du droit international de la santé liées aux situations d’urgence sont de celles-là quand bien même elles sont imparfaites ou partielles.

 

L’urgence sanitaire plonge ses racines aux origines mêmes de l’humanité1. Mais, au cours des siècles, les situations d’urgence se sont profondément transformées. Elles se sont élargies à des groupes humains de plus en plus importants pour atteindre une véritable mondialisation2 et ce ne peut être sans incidence sur les réponses qu’on leur donne ou que l’on cherche à leur donner. Traditionnellement, de la simple constatation de l’urgence naissent des conséquences en termes d’assistance3, sans qu’il soit besoin de définir l’urgence ou de vérifier, dans un cas particulier, la présence de certains critères. Ces conséquences se sont étendues et diversifiées au fur et à mesure que les moyens de faire face se développaient en termes techniques, financiers et humains. Pour lutter contre les épidémies, l’O.M.S. a ainsi progressivement constitué un « réseau mondial d’alerte et d’action » qui reçoit des données épidémiologiques actualisées en permanence et permet d’agir par anticipation en répercutant celles-ci, après vérification, aux professionnels de la santé et à tous les partenaires de la surveillance mondiale4. L’Organisation réglemente également les opérations d’assistance, notamment les dons de médicaments afin que ceux-ci répondent aux besoins réels des situations d’urgence, ce qui, malgré la parution en 1996 de Principes directeurs appropriés, est loin d’être toujours le cas 5. Enfin, elle est responsable de la coopération instaurée entre les différentes institutions concernées par une situation d’urgence, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du système onusien. Très schématiquement, cette coopération repose sur tout un maillage de protocoles d’accords qui assurent un cadre juridique permanent et évitent des négociations au coup par coup qui retarderaient les actions6. Sur le plan financier, la procédure utilisée par le système des Nations Unies est fondée sur un appel global, lancé par le Secrétaire général en fin d’année pour l’année suivante (23 pays ont été concernés pour 2001) et des appels ponctuels couvrant notamment les cas de catastrophe naturelle telles que sécheresse (Corne de l’Afrique), inondations (Cambodge, Madagascar, Mozambique, Vietnam) ou séismes (El Salvador, Inde)7. Le caractère de plus en plus potentiellement international des épidémies8 a néanmoins poussé l’O.M.S. à chercher à affiner la notion d’urgence et à définir une urgence sanitaire de portée internationale « en vue d’établir un arbre de décision qui, une fois mis à l’essai sur le terrain, pourrait aider l’O.M.S. et les pays à déterminer si un risque de santé publique revêt un caractère d'urgence sur le plan international et, dans l'affirmative, à décider des mesures de santé publique à appliquer »9. Dans cette optique, des travaux sont actuellement menés sur une révision du Règlement sanitaire international, base juridique des interventions de l’Organisation10 et leur aboutissement devient d’autant plus intéressant que les situations d’urgence sanitaire mobilisent toujours sur le terrain bien des moyens, quelquefois limités, quelquefois considérables, cependant que, au niveau des institutions, on cherche des réponses techniques, financières et juridiques adaptées à chaque cas. C’est ainsi que des implications potentielles particulièrement graves et/ou étendues, ont conduit à une évaluation différente des questions de santé publique présentant un caractère d’urgence quand celles-ci sont en relation avec le maintien de la paix et de la sécurité internationales (I). Elles ont également conduit à l’émergence d’une culture collective de l’urgence au niveau mondial (II).

 

 

I. - UNE menace à la paix et à la sécurité internationales

 

 

Toutes les situations d’urgence sanitaire, même à caractère international effectif ou potentiel, ne relèvent bien évidemment pas du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Une association entre une urgence sanitaire et un conflit ou une guerre civile prend à cet égard une signification particulière tant leurs éléments constitutifs semblent se renforcer réciproquement. En 2001, on a pu faire référence à de telles associations en Afrique occidentale, dans les territoires occupés et en Afghanistan ; elles ont été qualifiées par le Directeur général de l’O.M.S. de « situations d’urgence complexes »11. L’actualité récente montre également que la paix et la sécurité internationales peuvent être menacées par le bioterrorisme, dont les éventuelles manifestations à grande échelle constitueraient bien évidemment des situations d’urgence12. C’est cependant l’exemple du sida qui reste le plus symptomatique parce que la pandémie, bien qu’inégalement dévastatrice, n’épargne aucune partie du monde et parce que son impact sur le maintien de la paix, en Afrique tout au moins, est amplement démontré.

 

Le 5 juin 1981, une publication scientifique américaine, le Morbidity and Mortality Weekly Report, fait état pour la première fois de l’apparition dans la communauté homosexuelle de Los Angeles de cinq cas d’une forme rare de pneumonie, due à Pneumocystis carinii, qui ne devient pathogène que chez des sujets dont le système immunitaire est très déficient13. Vingt ans plus tard, on reconnaît que le VIH/sida « est devenu la maladie la plus dévastatrice que l’humanité ait jamais connue »14. En effet, au-delà de sa dimension strictement sanitaire, la pandémie de sida a un impact redoutable sur le développement, notamment parce qu’elle touche les tranches d’âge les plus productives – 15-49 ans – de pays déjà en situations difficiles et, par-delà ces tranches d’âge, le tissu social en son entier : le VIH-sida « entraîne des effets dévastateurs uniques en renforçant la pauvreté, en réduisant à néant les réalisations du développement humain, en affaiblissant la capacité des gouvernements à fournir et à maintenir des services essentiels, en diminuant la main d’œuvre et la productivité et en freinant la croissance économique»15. Ce développement exponentiel a fait que la pandémie a rapidement été considérée comme un problème important de santé publique, puis comme un problème international de santé publique, mais les choses n’ont pas pour autant bougé tout de suite, il s’en faut de beaucoup16. Ce n’est qu’avec une évaluation plus réaliste de ses différents effets alliée à une volonté politique d’agir que le Conseil de sécurité a été amené à se saisir de la question (A), démarche dont on analysera les conséquences juridiques (B).

 

 

A. - Un renouvellement de la problématique du maintien de la paix et de la sécurité

 

 

En droite ligne de l’évolution engagée depuis le début des années quatre-vingt dix, le Conseil de sécurité a été amené à « repenser son approche dans l’exécution de son mandat »17 et à élargir son champ de réflexion à une question de santé publique. Trois étapes peuvent globalement être dégagées.

 

 

1. - Une conception de la sécurité collective strictement militaire

 

Fondée sur la Charte des Nations Unies, la pratique des différents organes de l’Organisation repose sur une séparation des pouvoirs : au Conseil de sécurité, « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales » (article 24) ; au Conseil économique et social, celle des « questions internationales dans les domaines économique, social et (…) de la santé publique (…) » (article 62). Cette séparation des pouvoirs, toujours actuelle, a été d’autant plus respectée que le maintien de la paix était considéré dans une optique strictement militaire, en termes exclusifs de prévention ou règlement des conflits et de politiques d’armements. Comme le notait Michel Virally, « le maintien de la paix et de la sécurité internationales constitue, incontestablement, le grand problème de la société internationale. Cette affirmation ne nécessite pas une longue démonstration. Le nombre et la gravité des guerres qui ont marqué l’histoire de l’humanité, l’apparition et la répétition du phénomène de guerre ‘mondiale’ au 20ème siècle, l’invention, le perfectionnement et la multiplication des armes atomiques en ce siècle également, la persistance des foyers de crise et la multiplication des guerres locales depuis 1945 sont des faits assez angoissants et assez connus pour montrer à la fois la gravité du problème et l’urgence de lui trouver une solution »18.

 

 

2. - Une conception élargie à d’autres aspects

 

C’est la prise de conscience que d’autres phénomènes que des actes de guerre stricto sensu pouvaient menacer la paix et la sécurité internationales qui a infléchi cette conception initiale. Cette prise de conscience revient à Boutros Boutros-Ghali, dont l’Agenda pour la paix marque un tournant. Dans une pénétrante analyse des phénomènes conflictuels, il affirme « Pauvreté, maladie, famine, oppression et désespoir sévissent (…). Ces problèmes, qui sont à la fois la source et la conséquence des conflits exigent que l’attention que leur porte l’ONU ne se relâche pas et que les efforts qu’elle leur consacre constituent l’absolue priorité (…). Sécheresse et maladie peuvent décimer aussi impitoyablement que des armes de guerre. Alors même que de nouvelles possibilités s’offrent ainsi à l’Organisation, les efforts qu’elle déploie en vue d’instaurer la paix, la stabilité et la sécurité doivent dépasser le domaine de la menace militaire (…) »19. La porte était ouverte. Le Conseil de sécurité a donc élargi sa vision traditionnelle pour aborder la question de la sécurité des opérations de secours humanitaires qui sont menées à l’occasion de conflits armés, par exemple en Somalie, résolution 794 (1992) du 3 décembre 1992, en Bosnie, résolution 836 (1993) du 4 juin 199320 ou au Kosovo, résolution 1244 (1999) du 10 juin 1999 mais sans jamais aborder les questions de santé publique, si graves soient elles21. De l’humanitaire au sanitaire, il n’y avait cependant plus qu’un pas et c’est la lutte contre le sida qui a fourni l’occasion de le franchir.

 

 

3. - La prise en considération de la sécurité humaine

 

Ce ne fut pas sans réserves. La Chine et la Russie ont ainsi refusé de participer aux débats, estimant que cette question relevait d’autres organes que le Conseil de sécurité22. Un an plus tard, ces hésitations, pour ne pas dire franches oppositions, se retrouvent encore dans les interventions du représentant de l’Inde au Conseil de sécurité, M. Sharma et dans celle du représentant du Costa-Rica, M. Niehaus 23. Néanmoins, les travaux du Conseil doivent être replacés dans un contexte général, celui de l’évolution de la notion de sécurité. Comme l’a récemment analysé le Secrétaire général de l’OUA, Amara Essy, « [à] l’évidence, le Secrétaire général de l’ONU ne cesse de le répéter, la problématique de la sécurité internationale, et l’Afrique est concernée au premier chef, se pose dans des termes souvent différents de ceux posés par la Charte de 1945. C’est désormais moins la sécurité des Etats qui est en cause, que l’existence même de l’Etat en tant que système organisé de gouvernement. Il s’agit aujourd’hui tout autant de garantir la sécurité collective des Etats prévue par la Charte des Nations Unies (…) que d’assurer la sécurité globale des sociétés mises en danger par des guerres civiles ou diverses autres menaces comme la grande criminalité ou les pandémies comme le sida »24. Sur ces bases très instables, ce dernier vient en effet accentuer les difficultés : il entrave les efforts de développement par une destruction des structures familiales, sociales et économiques25. La pauvreté et l’exclusion qui en résultent favorisent les guerres civiles, en portant un coup à la stabilité politique des Etats, ainsi que les conflits entre Etats. Souvent à base interethnique, ceux-ci entraînent des déplacements massifs de populations, combattants armés et réfugiés, qui contribuent à la propagation de l’infection. D’où la réunion du Conseil de sécurité du 10 janvier 2000, « première fois, après plus de quatre mille séances de travail au cours des cinquante dernières années, que le Conseil de sécurité », eu égard à la « nature changeante des menaces à la sécurité dans le monde » se penche « sur une question relative à la santé en la considérant comme une menace pour la sécurité »26. Quelles conséquences en tirer ? 

 


B. - Conséquences juridiques

 

 

1. - La compétence du Conseil de sécurité reste liée à la responsabilité que la Charte lui confère, celle du maintien de la paix stricto sensu.

 

Que le concept de sécurité soit élargi ne signifie en aucune façon que le Conseil de sécurité va trouver ici une occasion d’empiéter sur les compétences du Conseil économique et social. Dans sa déclaration lors de la séance du 10 janvier 2000, M. Kofi Annan définit lui-même les contours de l’action du Conseil de sécurité et attribue à celui-ci le « rôle (…) d’empêcher les conflits de contribuer à la propagation du sida et d’entraver les efforts que déploient les autres partenaires pour maîtriser l’épidémie »27. C’est très exactement ce qu’a fait par la suite le Conseil, se retranchant derrière les termes du mandat que les organes des Nations Unies ont reçu de la Charte : dans sa résolution 1308 (2000) – la première à évoquer une question de santé publique – s’il encourage les Etats membres à mettre en œuvre une action de formation, prévention, dépistage et traitement, c’est uniquement à l’égard des personnels participant aux opérations de maintien de la paix28. La résolution ne concerne que de manière indirecte la population, civile ou militaire, non engagée dans ces opérations. Plus récemment, après la session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le sida tenue en juin 2001, le Président du Conseil de sécurité déclare, au nom du Conseil, que celui-ci « exprime son intention de contribuer dans son domaine de compétence, à la réalisation des objectifs énoncés dans la déclaration (…) »29. Enfin, lors des débats tenus le 29 janvier 2002 sur l’Afrique, la Vice-secrétaire générale, Mme Louise Fréchette, fait référence au sida en tant que « facteur qui contribue à la plupart des causes profondes de conflit, si ce n’est à toutes » mais propose au Conseil « de se concentrer sur des questions à propos desquelles (…) [il] a des responsabilités et des possibilités d’action directe »30.

 

 

2. - La nouvelle approche du Conseil de sécurité n’est cependant pas dénuée de valeur

 

En premier lieu, que le Conseil de sécurité fasse porter ses travaux sur le contenu de la notion de sécurité, prenant ainsi en compte l’évolution du monde contemporain, ne paraît aucunement outrepasser les termes de son mandat, bien au contraire. D’une part en effet, les termes de « maintien de la paix et de la sécurité internationales » ne comportent pas de définition31 et si d’autre part, comme on a pu le souligner, le maintien de la paix « a été inventé par l’Organisation des Nations Unies »32, il semble opportun que l’Organisation elle-même puisse en modifier les éléments par la voix de l’organe qui, aux termes de la Charte, en assume la responsabilité principale, quitte à ce que cet organe interprète ensuite strictement celle-ci en ce qui concerne les décisions qu’il est habilité à prendre33. Il serait toutefois erroné de ne voir dans cette nouvelle approche qu’exercice intellectuel ou discussion d’école. Les débats tenus sur cette question par le Conseil de sécurité en séance publique ne restent pas sans incidence : c’est toute une dynamique nouvelle qui en découle, dynamique de coopération et de suivi pour arriver à des mesures concrètes34, largement orchestrée, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du système onusien, par le Secrétaire général des Nations Unies35. Enfin, il est constitué un précédent pour ce qui concerne la façon d’aborder la question du maintien de la paix36. Les questions de santé publique, du moins les plus préoccupantes d'entre elles, sont ainsi portées à un niveau élevé, ce qui a des conséquences non négligeables sur la manière dont elles vont être traitées par les organismes compétents en la matière. Le même phénomène ressort de l'apparition d'une culture collective de l'urgence qui se développe parallèlement.

 

 

 

II. - Une culture collective de l’urgence37

 

 

La mondialisation se trouve dans tous les discours, chargée de connotations très différentes et recouvrant des réalités qui ne le sont pas moins mais très souvent réduite au seul domaine des échanges commerciaux. Or le monde est en premier lieu un nouvel espace, à la portée des simples citoyens comme des Etats les plus puissants, par les facilités séduisantes que procurent l’accélération de la circulation des personnes et des biens et celle de la diffusion des connaissances et des informations38. La prise de possession de ce nouvel espace entraîne peu à peu la formation d’un véritable « système mondial » qui repose sur une prise de conscience que certains phénomènes peuvent concerner l'humanité entière39. Les questions de santé publique prennent dans ce cadre et par le prisme des urgences sanitaires, un relief particulier qui fait se développer une solidarité sanitaire mondiale (A) en même temps qu’émerge une « exception sanitaire » (B).

 

 

A. - Développement d’une solidarité sanitaire mondiale

 

 

Toutes les sociétés mettent en pratique, d'une manière ou d'une autre, l'idée de solidarité sanitaire. L'élargissement de celle-ci à l'échelle mondiale est exprimée notamment dans la Déclaration de Jakarta qui prône une alliance mondiale pour la promotion de la santé40. Cette alliance a pour but de faire avancer les priorités d’actions dégagées ; on peut rattacher sa philosophie à deux ordres de considérations : droit fondamental de l’être humain, la santé prend valeur de bien commun de l’humanité (1) ; sa promotion est l’affaire de tous ; elle repose donc sur une coopération multilatérale au sein de laquelle les acteurs non étatiques jouent un rôle de plus en plus important (2).

 

 

1. - La santé, bien commun de l’humanité

 

Comme l’affirme la constitution de l’O.M.S., la santé est un droit fondamental de l’être humain. Par voie de conséquence, l’internationalisation potentielle des situations d’urgence sanitaire induit la notion de risque global de détérioration d’un bien dont chacun doit pouvoir, en théorie, disposer ; d’un bien qui serait donc commun à tous et dont les caractéristiques seraient les suivantes : non-exclusivité (il appartient à tous), non-rivalité (chacun peut en jouir en même temps), franchissement des frontières enfin (toutes les frontières : géographiques, économiques, socio-culturelles)41. En découle, au nom de considérations non seulement humanitaires - visant à améliorer le sort de l’homme - mais humanistes - considérant l’homme comme la valeur suprême et ayant pour fin le développement de ses qualités essentielles - le principe d’une solidarité mondiale : toute innovation ou invention déterminante, par exemple un vaccin, devrait pouvoir profiter à tous comme l’affirme d’ailleurs le Préambule de la Constitution de l’O.M.S. : « L’admission de tous les peuples au bénéfice des connaissances acquises par les sciences médicales, psychologiques et apparentées est essentielle pour atteindre le plus haut degré de la santé ». L’éradication de la variole grâce à une campagne de vaccination mondiale en est un bon exemple. Il va de soi que ce résultat ne peut être atteint que par la voie d’une coopération multilatérale qui repose sur un faisceau d’actions dont beaucoup peuvent être attribuées à des acteurs non étatiques.

 

 

2. - Le pouvoir croissant des acteurs non étatiques dans la promotion de la santé

 

Les acteurs non étatiques jouent, on le sait, un rôle de plus en plus important sur la scène internationale et dans des secteurs de plus en plus nombreux42. La société civile dont les organisations non gouvernementales sont sans doute la composante la plus active, reconnue au sein même du système onusien43, se pose face à l’Etat en même temps qu’elle coopère avec lui. Dans le domaine de la santé, il s’agit d’abord très certainement de la recherche d’une réponse à la faillite des Etats et des diverses institutions internationales, faillite maintes fois dénoncée et qui demeure, malgré les avancées, sous-jacente44. La société civile amène les responsables à penser les questions de santé publique en tant qu’élément de leur politique internationale et, dès lors, à établir des priorités qui influent sur l’élaboration des normes nationales et internationales. L’affaire de l’encéphalopathie spongiforme bovine par exemple a amené, autant par le tapage des médias que par l’action des associations, à une utilisation très étendue du principe de précaution et à un renforcement de la sécurité sanitaire45. En ce qui concerne le sida, les progrès thérapeutiques n’auraient sans doute pas été aussi rapides sans l’action des associations de personnes atteintes par la maladie46. Comme le déclare le Dr Peter Piot, directeur d’Onusida, « la société civile est le pivot de l’action contre le sida et sa participation massive est décisive dans tous les domaines pour faire reculer l’épidémie »47. La question de l’accès aux médicaments, qui concerne tous les médicaments et pas seulement ceux contre le sida, montre bien cette importance.

 

 

B. - Emergence d’une « exception sanitaire »

 

 

Jusqu’en 1994, chaque Etat pouvait librement produire des médicaments génériques avant même qu’un brevet relatif à un médicament ne tombe dans le domaine public. Le Brésil et l’Inde ont ainsi créé une industrie pharmaceutique locale, dont les produits sont beaucoup moins chers que les produits d’origine. Depuis 1994, les pays membres de l’O.M.C. sont censés mettre leur législation en harmonie avec les accords ADPIC (Aspects des droits de propriété intellectuelle relatifs au commerce). Ces accords imposent le versement de royalties au propriétaire du médicament d’origine pendant une durée de vingt ans. Cependant, en cas d’urgence nationale ou d’autres circonstances d’extrême urgence (article 31), un Etat a le droit de recourir aux licences obligatoires, qui lui donnent le droit de fabriquer un générique sans l’accord du détenteur du brevet ou de recourir aux importations parallèles, qui lui permettent d’acheter le produit original là où il est vendu le moins cher48. Les lectures successives qui ont été faites de cet article ont conduit à des résultats tout à fait opposés.

 

 

1. – Accès aux médicaments et intérêts particuliers

 

Dans un premier temps, les firmes pharmaceutiques, avec l’appui des Etats développés, ont cherché à ce que le système fonctionne sur la base d’une interprétation stricte des textes. Des poursuites ont donc été engagées49 puis, devant les protestations de plus en plus nombreuses causées par l’expansion importante de certaines pathologies (tuberculose, sida, malaria) et les campagnes virulentes menées par les ONG, Médecins sans Frontières par exemple, du type, « médicaments au nord, malades au sud », ces firmes ont été amenées à justifier leur position et se sont servi de trois ordres de considérations :

- les royalties servent à la recherche et donc à la découverte de nouveaux médicaments. Leur disparition signifierait stagnation des progrès thérapeutiques ; mais le pourcentage du chiffre d’affaires consacré par l’industrie pharmaceutique à la publicité est si important qu’il peut même être supérieur à celui qui est consacré à la recherche et il arrive que la recherche ne soit pas le fait des firmes elles-mêmes, mais d’organismes publics qui leur transmettent ensuite une licence d’exploitation exclusive50 ;

- les systèmes de santé des pays en voie de développement sont défaillants et donc incapables d’assurer une distribution à des personnes ciblées et une surveillance de longue durée, ce qui favoriserait l’abandon de leur traitement par les malades et l’apparition corrélative de nouvelles souches résistantes ; mais différentes enquêtes, dont une réalisée par Médecins sans Frontières, dont les conclusions sont confirmées par le dernier rapport annuel d’Onusida, montrent que les pays en développement – Botswana, Ouganda et quelques autres - qui se sont attaqués de front avec une volonté politique importante à la lutte contre le sida sont parvenus à baisser de manière significative les statistiques de la maladie51 ;

- Les médicaments ne sont pas différents des autres biens pour lesquels le système des brevets assure la juste rémunération de l’inventeur et pour lesquels celui-ci cherche à se protéger en prenant un brevet52 ; mais loin d’être assimilables à n’importe quelle marchandise, les médicaments ne sont pas des produits banalisés. Dans le domaine de la santé plus qu’ailleurs, il serait opportun de faire une différence « entre les connaissances – que l’on découvre et qui sont le bien de tous – et les produits ou procédés – que l’on invente et qui font l’objet de brevets »53. Or, en prenant des brevets de plus en plus en amont dans l’élaboration du produit, ce que font les firmes pharmaceutiques, on réduit le champ des connaissances communes, renforçant encore ce qu’on a pu appeler « l’accaparement unilatéral d’un bien commun »54.

 

Sous l’énorme pression développée par la société civile et relayée au sein même des organisations internationales notamment par l’action personnelle du Secrétaire général des Nations Unies qui a lui-même lancé une campagne d’accès aux génériques55, les firmes pharmaceutiques et les gouvernements qui les soutiennent ont pris conscience de la difficulté de leurs positions et ont dû se ranger au principe d’une exception sanitaire.

 

 

2. – Accès aux médicaments et intérêt général bien compris

 

Dans un premier temps les actions judiciaires sont abandonnées : les 39 compagnies pharmaceutiques qui avaient déposé une plainte contre l’Afrique du sud devant la Haute-Cour de Pretoria l’ont retirée le 18 avril 2001 ; les Etats-Unis ont fait de même le 25 juin 2001 en ce qui concerne la plainte qu’ils avaient déposée contre le Brésil en février précédent56. Dans un deuxième temps, les laboratoires commencent à pratiquer une politique de prix différenciée selon l’acheteur du médicament et se livrent rapidement à une surenchère très médiatique : Cipla, puis Merck, Abbott et Bristol-Myers Quibb proposent aux pays d’Afrique un traitement anti-sida à un prix très sensiblement inférieur à celui pratiqué ordinairement ; puis Pfizer donne gratuitement aux cinquante pays les plus pauvres un produit, le Diflucan, destiné à traiter des infections opportunistes provoquées par le virus 57. Dans un troisième temps enfin, lors de la conférence de l’O.M.C. à Doha, des 9-14 novembre 2001, le principe d’une exception sanitaire est formellement adopté dans une déclaration sur l’accord sur les ADPIC et la santé publique. Il n’y a pas négociation d’un nouvel accord mais interprétation de l’accord préexistant au vu des besoins spécifiques des pays pauvres en matière d’urgence sanitaire. La spécificité des problèmes de santé publique de ces pays est reconnue eu égard à la gravité des pathologies qui y sévissent (VIH/sida, tuberculose, paludisme notamment) en même temps que le principe de la protection de la propriété intellectuelle est rappelé et ses conséquences financières reconnues. Il est donc décidé que le droit des membres de l’OMC de protéger la santé publique doit être préservé et, en particulier, celui de promouvoir l’accès de tous aux médicaments. En conséquence, chaque Membre a le droit de déterminer librement ce qui constitue une situation d’urgence afin de pouvoir recourir aux dispositions de l’article 3158. En conférant à chaque Etat la possibilité de constater lui-même, en fonction de ses critères propres, l'existence d'une situation d'urgence sanitaire, l'OMC permet ainsi d'assurer de façon concrète la flexibilité prévue par l'article 31, disposition que les pressions des firmes et l'attitude des gouvernements de certains pays riches rendaient inapplicable.

 

Les pays développés ont donc fini par comprendre qu’il était de leur propre intérêt d’accepter le principe d’une « exception sanitaire » qui aurait pour effet de maintenir leurs partenaires dans une situation économique et sociale viable et, pour certains d’entre eux, les empêcheraient tout simplement de sombrer dans le chaos. Il s’agit là de l’émergence, en matière de santé publique, de la notion d’intérêt général mondial, choix politique de société correspondant aux intérêts bien compris de tous et qui figure d’ailleurs dans la constitution de l’O.M.S. dont le Préambule dispose : « Les résultats atteints par chaque Etat dans l’amélioration et la protection de la santé sont précieux pour tous. L’inégalité des divers pays en ce qui concerne l’amélioration de la santé et la lutte contre la maladie, en particulier les maladies transmissibles, est un péril pour tous ». Ce choix de société conduit à faire passer, dans des circonstances graves, les intérêts de la santé publique avant ceux du commerce international59.

 

* * *

 

L’urgence sanitaire requiert bien davantage que des déclarations d’intention ou des engagements théoriques. Rien ne sert de constater que certaines situations peuvent être une menace à la paix et à la sécurité internationales si certains Etats n’assurent pas au plan interne une politique de prévention et de traitement60. Rien ne sert de constater qu’une culture collective de l’urgence est en marche si certains Etats négligent ou bafouent les droits de tel ou tel groupe social61. En tout état de cause, on ne peut que se réjouir que les mécanismes du droit international de la santé concernant les situations d’urgence puissent être de plus en plus « fondés sur des règles admises par tous et pas simplement, comme depuis la nuit des temps, sur le fait que les plus forts ont les moyens d’agir et définissent en même temps les règles, les concepts et le mode de lecture de ce qu’ils font »62.

 

 

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NOTES

 

1 La Bible elle-même n’en renferme-t-elle pas un exemple avec les dix plaies envoyées à l’Egypte par Moïse, au nombre desquelles les moustiques, la vermine et les ulcères (Exode, 8 et 9) ? Plus près de nous, la peste, dont les nombreuses manifestations sont relevées par tous les historiens, notamment celle des années 1348 et suivantes qui, en ses deux formes bubonique, dite noire, et pulmonaire, fut rapportée de Crimée par des marchands génois et se propagea à travers l’Europe à une vitesse fulgurante, fauchant le tiers de la population et restant pour des siècles à l’état endémique avec des résurgences périodiques.

2 Comme l’a noté récemment le Secrétariat de l’O.M.S. : « La mondialisation des maladies infectieuses n’est pas un phénomène nouveau. Toutefois, les mouvements accrus de population, à des fins touristiques ou migratoires, ou à la suite de catastrophes, l’essor du commerce international de produits alimentaires et biologiques, les changements sociaux et environnementaux liés à l’urbanisation, à la déforestation et aux perturbations du climat, l’évolution des méthodes de préparation et de distribution des aliments ainsi que les nouvelles habitudes des consommateurs ont rappelé que les poussées de maladies infectieuses observées dans un pays font planer une menace sur le monde entier (…). Les épidémies peuvent devenir des urgences sanitaires de portée internationale sous l’effet de plusieurs facteurs conjugués : absence de données exactes, désinformation ou incohérence des informations que détiennent les gouvernements avec pour conséquence une dramatisation des faits rapportés par les médias et des pressions sur les pouvoirs publics pour qu’ils interviennent ; moyens insuffisants au niveau des pays pour déceler les épidémies à temps et les endiguer ; crainte de répercussions coûteuses si les épidémies sont notifiées ; absence de mécanismes appropriés d’action internationale, du point de vue tant juridique que technique » (O.M.S., Sécurité sanitaire mondiale : alerte et action en cas d’épidémie, Rapport du Secrétariat, A54/9, 2 avril 2001, par. 2 et 4).

3 Ainsi l’article 2 de la Constitution de l’O.M.S. assigne-t-il comme fonction à l’Organisation de « (…) d) fournir l’assistance technique appropriée et, dans les cas d’urgence, l’aide nécessaire à la requête des gouvernements ou sur leur acceptation ».

4 Ce réseau a été créé en avril 2000 sur la base de différents réseaux préexistants dont il optimise les potentialités (O.M.S., Sécurité sanitaire mondiale (…), op. cit., par. 10 et ss.).

5 Une enquête sur les médicaments envoyés en Albanie en mai 1999 a ainsi fait apparaître que, sur 108 listes soumises au ministère albanais de la santé, « 50% environ des listes n’indiquaient que les noms de marque, pour beaucoup inconnus des professionnels de santé locaux ; que seulement 56% indiquaient la date de péremption, 41 % environ des médicaments n’ayant plus qu’une durée de conservation inférieure à un an et que 18% des dons étaient constitués de petits emballages d’échantillons gratuits ou de médicaments rendus aux pharmacies » (O.M.S., Communiqué de presse, 1999/45, 3 septembre 1999). De même, selon une étude faite en 1997 par Epicentre et Pharmaciens sans Frontières, de 50 à 60 % des dons de médicaments faits à la Bosnie étaient inadaptés (ibid.). Cette situation perdure toujours et le gouvernement français étudie actuellement une réforme du système de redistribution à des fins humanitaires des médicaments récupérés par les pharmacies (Le Monde, 17 janvier 2002).

6 Des accords ont ainsi été conclus entre l’O.M.S., d’une part et d’autre part le H.C.R., le P.A.M. (Programme alimentaire mondial) ou l’O.I.M. (Organisation internationale pour les migrations). Des accords sont en cours de négociation avec l’UNICEF, le PNUD et le C.I.C.R. (O.M.S., Collaboration à l’intérieur du système des Nations Unies et avec d’autres organisations intergouvernementales : urgences sanitaires, Rapport du Secrétariat, A54/32 Add.1, 8 mai 2001, par. 10).

7 ibid., par. 2-3.

8 Même le monde animal est touché puisque, le 10 septembre 2001, un premier cas d’encéphalopathie spongiforme bovine a été détecté au Japon (Le Monde, 12 septembre 2001).

9 O.M.S., Sécurité sanitaire mondiale, op. cit., par. 15.

10 Voir Assemblée mondiale de la santé, résolution WHA54.14, 21 mai 2001.

11 Dr G.H. Brundtland, Allocution à la 54ème Assemblée mondiale de la santé, 14 mai 2001, doc A54/3.

12 Plusieurs agents sont recensés comme pouvant être utilisés à des fins terroristes, notamment le virus de la variole, le germe de la peste, l’agent de la tularémie, la toxine botulique et le bacille du charbon (V. le dossier spécial « L’autre menace : bactériologique, chimique et nucléaire » dans Le Monde, 28-29 octobre 2001, pp. 13-20 ainsi que, sur le site de l’O.M.S., la page http://www.who.int/emc/deliberate_epi.html). Les cas de contamination par le bacille du charbon survenus en octobre-novembre 2001 ont montré que cette menace n’est pas une hypothèse d’école. Ces événements ont d’ailleurs été à l’origine de mesures concrètes, tant au niveau national (en France, plan Biotox, Le Monde, 6 octobre 2001) qu’international : publication par l’O.M.S. de principes directeurs révisés quant à la conduite à tenir en cas d’infection par le bacille du charbon (O.M.S., Communiqué de presse, n° 44, 18 octobre 2001) ; demande faite par son Directeur général, le Dr Brundtland, de procéder à un réexamen des directives sur la vaccination anti-variolique – supprimée depuis le début des années 80 après l’annonce de l’éradication de la maladie – « compte tenu des inquiétudes actuelles sur une utilisation délibérée éventuelle du virus de la variole pour contaminer des populations » (O.M.S., Note à la presse, n° 15, 19 octobre 2001).

13 Pour un rappel historique complet, voir le Monde, 3-4 juin 2001.

14 ONUSIDA, Le point sur l’épidémie, décembre 2001. « Depuis le début de l’épidémie, plus de 60 millions de personnes ont été infectées par le virus ». Texte du rapport sur le site Internet d'ONUSIDA [http://www.unaids.org/].

15 Document distribué à la table ronde n°3 de l’Assemblée générale extraordinaire du 15 juin 2001 –Impact socio-économique de l’épidémie et renforcement des capacités nationales à combattre le VIH-sida, A/S-26/RT.3, § 1. Ces conséquences sont martelées dans chacun des rapports, chacune des déclarations ou interventions sur le sujet. Pour s’en tenir aux plus récents d’entre eux, on peut citer, parmi bien d’autres : le discours de Kofi Annan au sommet d’Abuja du 26 avril 2001 « le sida n’est pas seulement la première cause de mortalité sur le continent (africain), mais aussi la principale entrave au développement » (D.A.I. 2001, n° 12, 154) ; son rapport sur l’activité de l’Organisation en 2001 (A/56/1 du 9 septembre 2001) ; les communiqués de la F.A.O. 2001/30 du 10 mai 2001 et 2001/42 du 25 juin 2001 « le sida est un problème de développement de grande envergure (…) » ; la Déclaration d’engagement adoptée par l’Assemblée générale à sa 26ème session extraordinaire « Estimant que la pauvreté, le sous-développement et l’analphabétisme figurent parmi les principaux facteurs contribuant à la propagation du VIH/sida, et notant avec une vive préoccupation que l’épidémie aggrave la pauvreté et entrave ou enraye le développement dans un grand nombre de pays (…) » (A/RES/S-26/2, § 11) et, bien entendu, tous les rapports faisant le point sur l’épidémie publiés par ONUSIDA en décembre de chaque année.

16 Voir à ce sujet les résultats de l’enquête effectuée par le Washington Post publiés dans ses colonnes le 5 juillet 2000 dénonçant avec vigueur ce que l’on a pu appeler le « syndrome d’abdication » tant aux niveaux nationaux qu’international : « The Belated Global Response to A.I.D.S. in Africa » et « The World Shunned Signs of Disaster » [http://www.washingtonpost.com/ac2/wp-dyn/].

17 Conseil de sécurité, Communiqué de presse, CS/2088, 12 janvier 2001.

18 « Le maintien de la paix et de la sécurité internationales », in R.J.Dupuy (éditeur), Manuel sur les organisations internationales, Dordrecht, Nijhoff, Les livres de droit de l’Académie de droit international de La Haye, 1988, p. 397.

19 Agenda pour la paix, op. cit., § 13. V. également le Supplément à l’Agenda pour la paix, du 3 janvier 1995, où ces arguments sont réitérés (A/50/60-S1995/1), document disponible sur le site Internet des Nations Unies à l'adresse [http://www.un.org/french/docs/sgf/agpaix.htm].

20 Voir Hervé Cassan, « L’avenir du Conseil de sécurité : une question de méthode », in Annuaire français de relations internationales, n° 1, 2000, pp. 805-816, spécialement pp. 807-809 et 814-815. Ce nouveau rôle a d’ailleurs été entériné, dès 1995, par le Secrétaire général dans son Supplément à l’Agenda pour la paix précité qui analyse avec minutie le changement intervenu dans les opérations de maintien de la paix et dans lequel on peut lire : « Un deuxième changement d’ordre qualitatif tient à l’utilisation des forces des Nations Unies pour protéger des opérations humanitaires », § 18.

21 Le successeur de M. Boutros-Ghali, M. Kofi Annan, a d’ailleurs, dans un premier temps, conforté cette analyse puisque, dans son rapport du 16 avril 1998 sur « les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique », il identifie tous les problèmes de santé publique (paludisme, tuberculose, poliomyélite et sida), sans faire aucune place particulière au sida, non en termes de conflits mais en termes de développement durable, condition de paix durable et de croissance économique au même titre que la bonne gouvernance (§ 87). Sur le site Internet des Nations Unies, à l'adresse [www.un.org/french/ecosocdev/geninfo/afrec/sgreport/sgreport.htm].

22 Voir notamment la déclaration du porte-parole de la Chine, Chen Ranfeng rapportée par l’Humanité [www.humanite.presse.fr/journal/2000/2000-01/2000-01-12/2000-01-12-020.html] ou encore la note établie par le Parlement canadien [http://www.sen.parl.gc.ca/lpearson.htmfiles/hill/18_htm_files/french/newpage10.htm], et l’article de Valérie Gas « Coalition mondiale contre le sida » sur Médias France Intercontinents [http://www.rfi.fr/Kiosque/Mfi/sante/030200-1.html]. Les représentants de la Chine et de la Russie ont repris part aux débats lors de la séance du 29 janvier 2002 qui, pour être consacrée à la situation en Afrique, l’a été de manière plus traditionnelle. Voir infra l’intervention de Mme Louise Fréchette et note 30.

23 Voir les débats du 19 janvier 2001 au Conseil de sécurité, S/PV.4259, disponibles sur le site des Nations Unies [http://www.un.org/french/docs/sc/pvs/pv4259f.pdf] pour le matin et [http://www.un.org/french/docs/sc/pvs/pv4259f1.pdf] pour l’après-midi.

24 Amara Essy, intervention lors de la séance du Conseil tenue le 29 janvier 2002 sur « la situation en Afrique » (S/PV.4460). Disponible sur le site Internet des Nations Unies, à l'adresse [http://www.un.org/fgrench/docs.sc/pvs/pv4460f.pdf].

25 Voir supra note 15. « Nous nous heurtons à une grande crise de développement et, plus que cela, à une crise de sécurité, car sans espoir sur les plans économique et social nous n’aurons pas la paix et le sida ne manquera pas de porter atteinte tant au développement qu’à la sécurité » (James Wolfensohn, président de la Banque mondiale, débats au Conseil de sécurité du 10 janvier 2000, op. cit.).

26 Al Gore, vice-président des Etats-Unis, allocution d’ouverture (S/PV.4087). Cette réunion fut le résultat de la conjugaison de deux faits : après des années d’indifférence, la question du sida était brusquement devenue d’actualité sous l’administration Clinton, sans que l’on sache d’ailleurs à quoi attribuer cet intérêt soudain (V. l’enquête du Washington Post « The World Shunned Signs of Disaster », op. cit.) et il était apparu à M. Richard Holbrooke, représentant permanent des Etats-Unis aux Nations Unies, la nécessité de proposer un thème aux travaux du Conseil de sécurité pour le mois de janvier 2000, la présidence tournante du Conseil revenant alors aux Etats-Unis. S’étant fixé sur l’Afrique, M. Holbrooke proposa d’ouvrir les débats avec la question du sida, particulièrement aiguë sur ce continent.

27 Débats du 10 janvier 2000, op. cit. On sait que les Secrétaires généraux successifs de l’ONU ont « toujours retenu une interprétation très large de [leurs] fonctions n’hésitant pas à aller au-delà du texte même de la Charte (Hervé Cassan, op. cit., p. 810). Plus généralement, voir Abdelaziz Ben Dhia, « Le rôle du Secrétaire général des Nations Unies en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales », Mélanges Boutros Boutros-Ghali, Bruxelles, Bruylant, 1998 , tome 1, pp. 227-244. Très sensibilisé à la question du sida, qu’il évoque dans chacun de ses rapports annuels (voir notamment A/54/1 du 31 août 1999, §§ 164 ss. ; A/55/1 du 30 août 2000, §§ 207 ss ; A/56/1 du 9 septembre 2001, §§ 146 ss), M. Kofi Annan a fait de la lutte contre la pandémie une « priorité personnelle ».

28 Conseil de sécurité, résolution 1308 (2000) du 17 juillet 2000.

29 Déclaration du président du Conseil de sécurité du 28 juin 2001, S/PRST/2001/16. Souligné par nous.

30 Conseil de sécurité, 29 janvier 2002, S/PV.4460.

31 Voir les développements de Serge Sur, in Jean Combacau, Serge Sur, Droit international public, Paris, Montchrestien, 5ème édition 2001, pp. 616-617.

32 Boutros Boutros-Ghali, Agenda pour la paix, op. cit., § 46.

33 Ainsi que le soulignait Michel Virally « (…) les possibilités de fonctionnement d’un système de maintien de la paix et de la sécurité internationales, et sa nature même, ne peuvent faire l’objet d’appréciations abstraites, sur la seule base des textes qui l’organisent. Elles varient constamment en fonction de la conjoncture politique internationale, c’est à dire des rapports internationaux réels, tels qu’ils existent à un moment donné entre l’ensemble des Etats composant la société internationale. (…) cette dimension historique ne doit jamais être perdue de vue », « Le maintien de la paix et de la sécurité internationales », op. cit., p. 401.

34 On peut consulter, parmi d’autres exemples, le rapport publié en novembre 2000 par le Partenariat pour l'Afrique sur les réalisations concrètes engagées dans treize pays d'Afrique en résultat d'actions de coopérations locales, régionales et internationales, ainsi que sur les actions des Organismes coparrainant (Banque mondiale, UNICEF, OMS, UNESCO, PNUD, ...), celles des pays donateurs et celles des ONG et d'autres groupes d'intérêt [http://www.unaids.org/africapartnership/files/IPAA-DecUpdateF.doc]. Voir également la Déclaration d'engagement (A/RES/S-26/2) sur le VIH/sida adoptée par l'Assemblée générale extraordinaire des 25-27 juin 2001 - première Assemblée extraordinaire consacrée au domaine de la santé publique – qui contient des objectifs précis à réaliser par les Etats signataires dans les délais donnés (par exemple au § 47 : (…) réduire l'incidence du VIH parmi les jeunes, hommes et femmes, âgés de 15 à 24 ans de 25% d'ici à 2005 dans les pays les plus touchés et de 25% à l'échelle mondiale d'ici à 2010 …). Voir enfin la longue déclaration du Représentant de Cuba lors de la réunion du Conseil de sécurité du 29 janvier 2002 (S/PV.4460), qui rend spontanément compte au Conseil des mesures prises ou proposées par son pays.

35 Dont on a souligné supra le rôle moteur. Voir les propos de M. Josselin, ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie : « Le Secrétaire général des Nations Unies a l’autorité politique et morale pour continuer à maintenir en alerte les consciences collectives, pour maintenir l’éveil de chacun des pays (…) pour faire le point et pour vérifier que nous conformons nos actes aux paroles … » (Conseil de sécurité, débats du 10 janvier 2000, op. cit.).

36 V. l’intervention d’Al Gore lors de l’ouverture de la session du Conseil de sécurité du 10 janvier 2000, « le fait que nous commençons en portant notre attention sur le sida (…) constitue un précédent pour l’action du Conseil de sécurité en ce qui concerne son ordre du jour en matière de sécurité. Cette réunion exige de nous que nous considérions la sécurité sous un nouvel angle plus large et que désormais nous pensions à elle selon une nouvelle définition plus ample ».

37 L’expression « culture de l’urgence » est empruntée au Dr J.-P. Menu, Coordinateur de l’urgence au sein de la Division de l’urgence et de l’action humanitaire à l’O.M.S, rapport du 17 décembre 1996 à la Fédération internationale des sociétés de Croix-Rouge et du Croissant Rouge. Ce rapport est disponible sur le site Internet de l'O.M.S. à l'adresse suivante : [http://www.who.int/disasters/repo/6608.doc].

38 Voir Elisa Kaltcheva, « Mondialisation et sécurité internationale : ordre ou turbulences ? », Le Maintien de la paix, novembre 2001, bulletin n°55, disponible sur le site Internet de l'IQHEI à l'adresse [http://www.ulaval.ca/iqhei/BULL_55_.pdf].

39 « Le processus de la mondialisation comporte aussi un aspect purement cognitif : le sentiment de plus en plus poussé d’appartenir à un ‘village planétaire’, la prise en compte de l’espace mondial comme un tout commun, l’émergence d’une conscience globale et d’angoisses face à des problèmes qui dépassent le cadre communautaire ou national (tels le réchauffement climatique ou l’appauvrissement de la couche d’ozone) », ibid.

40 Déclaration de Jakarta « sur la promotion de la santé au XXIème siècle », 25 juillet 1997. Document O.M.S. : WHO/HPR/HEP/41CHP/BR/97.4.

41 Voir Inge Kaul, « Biens publics globaux, un concept révolutionnaire » et « Des mécanismes d’action collective », le Monde diplomatique, juin 2000, p. 22-23. Il est encore trop tôt pour appréhender toutes les implications juridiques de ce "nouvel outil théorique" (ibid.), en phase de gestation.

42 En témoignent deux exemples récents : à la troisième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (PMA-III), tenue à Bruxelles du 14 au 20 mai 2001, les travaux se sont articulés autour de deux grands axes : un volet intergouvernemental et un volet société civile, dont le comité préparatoire prévoyait qu’ils « s’enrichiront mutuellement » (CNUCED, Communiqué de presse, TAD/INF/2852 du 28 juillet 2000). Egalement le Sommet de Laeken des 14 et 15 décembre 2001 a décidé que, dans le cadre de la Convention chargée d’élaborer la réforme des institutions européennes, un forum serait ouvert aux représentants de la société civile – partenaires sociaux, milieux économiques et académiques, ONG européennes – et fournira des contributions aux débats, (Le Monde, 16-17 décembre 2001).

43 A la demande du Conseil économique et social, l’Assemblée générale a examiné la question de la participation des ONG au travail de l’Organisation des Nations Unies sur la base d’un rapport du Secrétaire général « Arrangements et pratiques régissant l’interaction des ONG dans toutes les activités du système des Nations Unies » (A/53/170 du 10 juillet 1998). Ce document reconnaît explicitement que l’interdiction par traité des mines antipersonnel est due aux efforts des ONG (§ 56). Mais il faut constater que les ONG ne sont pas toujours aussi efficaces : manque de coordination, a priori gênant leur action, dispersion des efforts sont ainsi dénoncés par J.-M. Vigouret, « Comment permettre aux habitants des PVD de bénéficier des thérapies anti-VIH actuelles ? », ATTAC, Haut-Rhin, [http://www.local.attac.org/attac68/documents/ATTAC-docaccesauxsoins-68.htm]. Par ailleurs, dans le domaine des droits de l’homme, l’action des ONG semble souvent limitée voire encadrée : la Commission des droits de l’homme ne leur consent qu’un rôle mineur et on arrive à ce non-sens qui est l’apparition d’ONG dites gouvernementales (ou GONGOS pour « governmental NGO ») qui soutiennent l’action des gouvernements (Le Monde, 27 avril 2001).

44 « L’ONU, c’est 189 membres et chaque ambassadeur représente les intérêts de son pays. La ‘volonté collective de l’humanité’ est une belle formule mais elle n’a aucun sens lorsqu’on se heurte aux complexités des problèmes que nous avons à traiter ici », Richard Holbrooke, intervention au Conseil de sécurité, débats du 19 janvier 2001 précités note 23. Voir, en ce qui concerne l’O.M.S., B. Deveaud, B. Lemennicier, L’O.M.S., bateau-îvre de la santé publique - Les dérives et les échecs de l’agence des Nations Unies, Paris, L’Harmattan, 1997, 177 p. De même, l’Assemblée générale extraordinaire des 25-26 et 27 juin 2001, consacrée au sida, a pu apparaître comme le lieu où se sont cristallisées les divergences (en particulier, afin de ménager les pays islamiques, absence de référence, dans la Déclaration finale, aux homosexuels, aux toxicomanes et aux prostituées en tant que « groupes vulnérables » devant bénéficier à ce titre de programmes spécifiques de prévention et d’accès aux soins (Le Monde, 26 au 29 juin, 5 et 7 juillet 2001).

45 Les institutions internationales coopèrent et anticipent : l’O.I.E, l’O.M.S. et la F.A.O. demandent que l’usage des farines animales soit interdit au niveau mondial dans l’alimentation des ruminants (Le Monde, 16 juin 2001) ; les gouvernements sont vigilants et réagissent à chaud aux révélations des journalistes : à la suite d’un article du Guardian, selon lequel le sang de donneurs britanniques contaminés par la forme humaine de l’E.S.B. a été utilisé et exporté, le ministre britannique de la santé fait valoir qu’en l’état actuel des connaissances le risque de transmission interhumaine par voie sanguine ne peut être considéré que comme « purement théorique » (Le Monde, 6 février 2001). Enfin, la recherche est stimulée: une équipe espagnole annonce avoir mis au point une méthode d’analyse pouvant révéler, sur la base de prélèvements faits sur du cheptel vivant, si des bovins ont été nourris avec des farines carnées (Le Monde, 22 février 2001).

46 Voir la page consacrée par Le Monde des 3-4 juin 2001 à l’action des associations.

47 Onusida, Communiqué de presse, 9 octobre 2000. Les ONG ont été très présentes à l’A.G.E. de juin 2001 où elles ont organisé de manière tout à fait officielle de multiples tables rondes, groupes de travail et réunions informelles parallèlement aux débats.

48 Pour une analyse complète, voir notamment le dossier réalisé par la Documentation française sur L’accès aux médicaments [www.ladocfrançaise.gouv.fr] ou le document de travail distribué par l’O.M.S. Mondialisation, ADPIC et produits pharmaceutiques, Genève, mars 2001, WHO/EDM/2001.2.

49 A l’O.M.C. : Etats-Unis et Union européenne contre Inde, respectivement en 1996 (WT/DS50/AB/R) et en 1997 (WT/DS79/R) plaintes qui ont abouti à la condamnation de l’Inde ; Etats-Unis contre Brésil en février 2001 ; enfin 39 laboratoires ont déposé une plainte contre le gouvernement sud-africain devant la Haute-Cour de Pretoria.

50 Le Monde, 10 octobre 2000 ; M. Bulard, « Les firmes pharmaceutiques organisent l’apartheid sanitaire », Le Monde diplomatique, janvier 2000, pp. 8-9 ; J.-C. Leclerc, « L’industrie pharmaceutique et le sida : une discrimination intolérable », Le Devoir, 12 mars 2001 ; M.S.F., Campagne pour l’accès aux médicaments [http://www.paris.msf.org].

51 Ph. Rivière, « Batailles équivoques contre le sida », Le Monde diplomatique, juillet 2001, p. 3 ; MSF, Les trithérapies dans les pays en voie de développement, c’est possible, Communiqué de presse, 28 novembre 2001 ; Onusida, Le point sur l’épidémie, décembre 2001 (ONUSIDA/01.75F – WHO/CDS/CSR/NCS/2001.2).

52 Voir la déclaration sans ambages du directeur général du syndicat français de l’industrie pharmaceutique : « Je ne vois pas pourquoi on exigerait de l’industrie pharmaceutique des efforts spécifiques. Personne ne demande à Renault de donner des voitures à ceux qui n’en ont pas » ... Rapporté par M. Bulard, op. cit.

53 Professeur Axel Kahn, ibid.

54 Ph. Queau, Propriété intellectuelle et bien commun mondial, Paris, UNESCO, 1999, [http://www.unesco.org/webworld/points_of_views/queau_051199.shtml]. A noter que « l’accaparement unilatéral » va bien au-delà puisque les firmes sont en train de breveter des protéines isolées de plantes tropicales, par exemple la brazzein, issue d’une plante poussant au Gabon, dont les propriétés sont connues et utilisées de longue date dans ce pays. V. F. Seuret, R.A. Brac de la Ferriere, « Le biopiratage de l’Afrique », Manière de voir, septembre-octobre 2001, pp. 46-49.

55 Le Monde, 6 mars 2001.

56 Respectivement Le Monde des 20 et 21 avril 2001 et du 27 juin 2001.

57 Entre autres : Libération, 3 avril 2001 ; Yahoo ! Actualités santé des 30 mars et 6 juin 2001 ; nombreux communiqués de presse de l’O.M.S.. A noter que le Commissaire européen Pascal Lamy soutenait le principe d’une différenciation des prix et que le Brésil proposait d’utiliser l’indice de développement humain du PNUD pour un juste calcul de ceux-ci. V. Le Monde, 3 avril 2001.

58 O.M.C., WT/MIN(01)/DEC/W/2 du 14 novembre 2001. Il reste à trouver une solution pour que les pays qui n’ont pas d’industrie pharmaceutique locale puissent légalement importer des génériques. L’adoption du texte final a été fortement encouragée par les Etats-Unis qui, venant d’être confrontés au problème angoissant de la propagation du bacille du charbon, avaient négocié avec Bayer la fourniture d’énormes quantités d’un antibiotique – le Cipro – à des prix très bas en brandissant, pour obtenir l’accord de la firme, la menace de la fabrication éventuelle de génériques (Le Monde, 14 novembre 2001).

59 Une extension du phénomène à d'autres secteurs – moins urgents – ne semble pas d'actualité si l’on pense à toutes les maladies non susceptibles d’être traitées parce qu’elles concernent des patients non solvables – la population des pays pauvres en l’occurrence - et pour lesquelles toute recherche ou toute diffusion du médicament existant a été abandonnée : maladie du sommeil, méningites bactériennes, parasitoses tropicales. Voir, à cet égard, M. Bulard, « Les firmes pharmaceutiques (…) », op. cit. Le même phénomène existe pour les pays développés où l’on recense pas moins de 950 maladies rares, dites orphelines, parce qu’elles sont très peu répandues et donc non rentables pour l’industrie pharmaceutique. Une Alliance pour les maladies rares a été créée à Paris le 24 février 2000. L’un de ses objectifs est la création et la vente de médicaments, même non rentables (V. le site de la Fédération des Maladies orphelines [http://www.fmo-afrg.com]).

60 A cet égard, le bras de fer engagé entre la Haute Cour de Pretoria et le gouvernement sud-africain ne manque pas d'intérêt.

On sait que le président Thabo Mbeki soutient des théories contestées par l'ensemble de la communauté scientifique et refuse de reconnaître le lien entre VIH et sida. Son gouvernement n'a donc adopté aucun programme destiné aux personnes séropositives et à celles atteintes du sida (Le Monde, 16-17 et 22 décembre 2001). Dans une décision du 14 décembre 2001, estimant que la politique de soins de santé méconnaissait les dispositions constitutionnelles garantissant le droit à la santé, la Haute Cour a donc imposé au gouvernement l'obligation de mettre à la disposition des femmes enceintes séropositives devant accoucher dans le secteur public, la Nevirapine, médicament permettant de limiter la transmission du VIH à l'enfant, qui est déjà adopté dans le secteur privé. Allant encore plus loin, elle vient de décider le 11 mars 2002 que l'appel interjeté par le gouvernement n'était pas suspensif sur ce point et que celui-ci demeurait donc assujetti à l'obligation prononcée à son égard le 14 décembre. Les deux décisions de la Haute Cour sont consultables dans leur intégralité sur le site Internet de l'ONG sud-africaine Treatment Action Campaign, à l'adresse [http://www.tac.org.za/documents].

61 Voir, en ce qui concerne le sida, l’importance fondamentale de l’attitude des pouvoirs publics en matière de droits de l’homme, à l’égard desquels ils ont un triple devoir de respect, de protection et de réalisation : Assemblée générale extraordinaire de juin 2001, Table ronde n°2 : Le VIH/sida et les droits de l’homme (A/S-26/RT.2).

62 H. Védrine, discours d’ouverture de la 2ème conférence de Paris du droit et de l’économie, cité par J.F. Dobelle, Pratique française du droit international, Annuaire français de droit international, 1999, p. 918.

 


 

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POULAIN M. - "Urgence sanitaire et droit international". - Actualité et Droit International, mars 2002. [http://www.ridi.org/adi].

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