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note de
lecture (rédigée en septembre 2004 par Roland Adjovi) est disponible au
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Nombre de sommités nationales et
internationales s’accordent pour vanter les mérites de cet ouvrage. Nous
n’allons point ajouter notre petite voix à cette harmonie symphonique, car elle
n’apporterait rien de plus. Mais, après une lecture attentive, nous ne pouvons
que dire l’importance de ce chef d’œuvre pour tous les pays – notamment les
pays en développement –, en tentant de rendre compte de son objet. Car Global
Public Goods ne fait pas forcément sens pour tous, nous les premiers. Le
thème pourrait se traduire littéralement par les biens publics universels,
ou, sous une forme plus complète, les biens et services publics dont la
production profite à tous (pp. 87-88, 95). Pour illustrer cela, il s’agit par
exemple de la route qui profite à toute personne qui l’utilise et non seulement
à celui qui en finance la construction. L’adjectif global marque le
caractère universel, mondial.
Cette définition très synthétique
pose tout l’enjeu de l’ouvrage qui va en deux sens. D’abord les auteurs se sont
attachés à une approche théorique en approfondissant à la fois le concept et les
politiques qui l’entourent. Puis ils se sont appliqués à en déterminer et
évaluer la mise en œuvre pour proposer une évolution efficiente des politiques
publiques, qu’elles soient nationales ou internationales.
Il faut, dans un premier temps,
souligner la dualité de la notion : global public goods et global
public bads, cette seconde forme étant toute chose qui nuit à l’ensemble de
la communauté nationale ou internationale (p. 182). Le terrorisme en constitue
un exemple typique contemporain. L’identité entre ces deux formes de la notion
réside dans l’existence d’un intérêt général qui appelle une solution commune et
non individuelle.
Il faut ensuite relever la
pertinence du thème dans un contexte de globalisation, car en démontrant
que certains biens et services bénéficient à tous en même temps, les auteurs
soulignent l’impératif d’une politique concertée et consensuelle, et en
déterminent les conditions d’existence et d’exercice. Une telle analyse
s’inspire à la fois du passé avec une perspective historique du concept
(pp. 63-77), et du présent, du national et de l’international. Les auteurs
soulignent la nécessité d’une régulation qui découle de la nature même de ces
biens et services.
Il faut enfin mettre l’accent non
sur le premier temps de l’analyse qui consiste en une théorie générale des
global public goods, mais sur les second et troisième temps que constituent
les processus décisionnel et de production. La théorie générale permet de mieux
cerner la notion, dans toutes ses dimensions – y compris mathématique –, mais
elle n’est pas facilement accessible au lecteur techniquement mal outillé, ce
qui est certainement le cas du juriste. Les processus décisionnel et de
production par contre sont d’un abord plus facile par leur contenu moins
exclusivement technique. Sur le plan décisionnel (pp. 181-303), parce que
l’avantage est universel, tout bénéficiaire potentiel devrait avoir son mot à
dire, d’où une implication simultanée des Etats – acteurs traditionnels des
relations internationales – et des privés – qu’il s’agisse d’individus ou de
groupements d’individus comme les organisations non gouvernementales. Cependant,
au terme du processus, la décision reste souvent le fait des Etats,
individuellement ou collectivement. Sur le second plan, celui de la production
(pp. 305-429), les Etats s’appuieront plus sur des structures de nature
économique et privée, même si l’armature est publique comme les multinationales
d’un côté, et les institutions financières internationales de l’autre. La
globalisation y est disséquée et ses limites mises en exergue. L’ouvrage se
clôt par des études de cas où il est question successivement de la stabilité
financière internationale, de la régulation du commerce international, de la
santé, de la biodiversité, de l’eau, de l’énergie et … de la corruption.
L’ouvrage offre aussi de nombreux encadrés sur des thèmes spécifiques avec un
glossaire qui facilite la compréhension par le néophyte.
Pour conclure il faut souligner,
dans la perspective de l’actualité internationale contemporaine, que dans un
système mondialisé où le positif comme le négatif n’a plus un impact
circonscrit, le multilatéralisme demeure une voie plus sûre que
l’unilatéralisme. Toute hégémonie tend à constituer un global public bad
dans la mesure où elle fera prévaloir l’intérêt d’un nombre réduit sur celui du
plus grand nombre. Ainsi en est-il de la politique américaine en matière de
climat, mais aussi de lutte contre le terrorisme. C’est d’ailleurs en ce sens
que Louise Arbour, Haut Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme, a
centré son intervention à la Conférence biennale de la Commission internationale
des Juristes (Berlin, octobre 2004) sur les conséquences négatives de la lutte
actuelle contre le terrorisme sur les droits de l’homme, et l’état de droit plus
généralement. Le terrorisme constitue donc un public global bad, mais la
politique publique qui vise à le contrer peut aussi être de même nature,
notamment lorsqu’elle est unilatérale et hégémonique.
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