1) VIH/Sida
Depuis janvier 2000 avec sa première séance consacrée
au Sida, et plus particulièrement depuis le 17 juillet 2000 avec
l’adoption de la Résolution
1308 (2000) du Conseil de sécurité, la question du VIH/Sida fait
ouvertement partie des préoccupations des Nations Unies, dans le cadre
du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Cette
inclusion résulte du constat de l’extension de la pandémie, et des
risques qu’elle induit dans les zones en conflit en raison des
violences sexuelles commises. Cette inclusion fait de la pandémie une
menace à la sécurité, ce qui pourrait fonder une résolution
obligatoire pour les Etats, même s’il est difficile de deviner en
pratique quel en serait le contenu. C’est la persistance d’une
approche sectorielle de la sécurité collective, avec les Résolutions
sur les femmes et les conflits armées, les enfants et les conflits armés,
etc.
Le vif intérêt des Nations Unies pour la question a
conduit à la Session
extraordinaire de l’Assemblée générale sur le VIH/Sida (25-27 juin
2001). La déclaration
finale fixe les objectifs à poursuivre dans la lutte contre le fléau,
ce qui pourrait fonder une meilleure action en la matière, et une stratégie
en préparation au Secrétariat général de l’Organisation.
2) Algérie
La lutte islamiste qui dure depuis déjà une dizaine
d’années et la déstabilisation du pouvoir politique algérien a
failli faire oublier les revendications culturelles des Berbères en général,
ceux de la Kabylie en particulier. Depuis maintenant deux mois, le
pouvoir de Abdelaziz Bouteflika est ébranlé par la résurgence de
cette volonté de reconnaissance nationale de la spécificité berbère.
L’objectif est de mettre fin à une politique nationale
d’arabisation persistante. Les manifestations depuis le début du mois
de juin sont prohibées puis réprimées selon des humeurs policières
dont la presse se fait l’écho.
Paradoxalement les Institutions qui se sont « spécialisées »
dans la réaction aux crises, demeurent silencieuses pour l’instant.
Ni l’O.N.U. ni l’O.U.A. n’ont réagi matériellement à cette évolution
politique en Algérie où la présomption de violations des droits de
l’homme est patente et où elles ont tous les arguments classiques
tournant autour du droit à la différence et de l’auto-détermination
interne ou externe. Il faut espérer que la situation paraisse
suffisamment critique désormais pour que les réactions se fassent. Les
Algériens ne pourraient qu’y gagner, car l’œil extérieur, tant
qu’il n’est pas impérialiste ni donneur de leçons, permet de réduire
les risques de violations massives des droits humains.
3) Angola
La guerre a repris de plus bel, l’UNITA ayant ré-occupé
(ou gardé) les zones diamantifères qu’elle contrôlait auparavant et
que Luanda tente désormais de lui reprendre ardemment. Dans sa Résolution
1336 (2001) du 23 janvier 2001, le Conseil de sécurité proroge
pour une durée de trois mois, le mandat de l’instance de surveillance
établi par la Résolution
1295 (2000), et permet au Secrétaire général de « reconduire
dans leurs fonctions les experts, au nombre de cinq au maximum ».
La Résolution
1348 (2001) du 19 avril 2001 vient étendre le même mandat pour une
nouvelle période s’achevant le 19 octobre 2001, en autorisant le Secrétaire
général à renouveler l’équipe de cinq experts. Il y est aussi
demandé au Président du Comité des sanctions sur l’Angola de présenter
un rapport supplémentaire au plus tard à la fin du nouveau mandat de
groupe de surveillance.
4) Erythrée et Ethiopie
Dans sa Résolution
1344 (2001) du 15 mars 2001, le Conseil de sécurité a prorogé le
mandat de la Mission des Nations Unies en Ethiopie et en Erythrée
(MINUEE) pour une période de six mois (mars – septembre) dans la
limite de l’effectif fixé par la Résolution 1320 (2000). Il étend
aussi les actions que doit exécuter la MINUEE, en l’« engageant »
à soutenir la Commission mixte de tracé des frontières entre les deux
Etats. Une autre tâche d’une Opération de Maintien de la Paix, qui
étend le champ des possibles dans le cadre d’une globalisation du
concept de sécurité.
5) République Centrafricaine
La République Centrafricaine (RCA) constitue l’exemple
où la Communauté internationale a partiellement réussi à ramener la
paix, d’abord avec une gestion régionale (MISAB, force
d’interposition mise en place par le Sommet des Chefs d’Etat et de
Gouvernement de France et d’Afrique) prolongée par une gestion
onusienne (MINURCA, puis BONUCA). Succès relatif puisque les tensions
ne se sont pas complètement tues. Dans ses différents rapports au
Conseil de sécurité notamment depuis les dernières élections, le
Secrétaire général n’a cessé de rappeler la persistance de différends
politiques entre le pouvoir en place de Ange-Félix Patassé et
l’opposition, ainsi que celle d’une situation socio-économique
difficile, en ajoutant les conséquences du conflit en République démocratique
du Congo (R.D.C.) (cf. le dernier rapport du Secrétaire général de
janvier 2001, S/2001/35).
Dans la nuit du 27 au 28 mai dernier, ces tensions n’ont
pas manqué de s’extérioriser violemment avec la tentative de putsch
conduite par des forces de l’opposition qui ont voulu prendre
d’assaut la résidence du Chef de l’Etat. C’est une évolution négative
puisque ces dernières années, le pays n’a connu que des mutineries
sans véritable intention de s’emparer du pouvoir en renversant le régime
en place. Les forces loyalistes, ayant probablement profité pour s’améliorer
d’un soutien international à la reconstruction du pays, ont pu garder
le contrôle de la situation, soutenues par un contingent libyen venu spécialement
pour la « bonne cause ». Il faut rappeler que
l’ambassadeur libyen avait été assassiné au cours de l’année
dernière, le 20 août 2000, par un groupe armé à Bangui. Ces forces
loyalistes ont procédé à une « chasse aux sorcières »
dont le bilan reste difficile à établir.
Les Nations Unies ont immédiatement été à pied d’œuvre
grâce à la veille assurée dans le pays avec le BONUCA (Bureau des
Nations Unies pour la consolidation de la paix en Centrafrique) et au siège
à New York, pour entamer des négociations, d’où l’intérêt des
missions de consolidation et de reconstruction de la paix. Le général
Amani Toumani Touré qui avait déjà assuré le même service de médiateur
en 1997, est rappelé comme Envoyé spécial du Secrétaire général à
Bangui. Au bout d’une dizaine de jours durant lesquels il a rencontré
le président Bongo du Gabon, médiateur tous azimuts dans les conflits
de l’Afrique centrale, ainsi que les parties centrafricaines, ces
conclusions sont toujours aussi objectives et déterminées : il
faut faciliter les discussions entre les parties au conflit, assurer la
participation de tous à la gestion politique du pays, et donner aux
militaires des missions claires avec des conditions de vie décentes
pour qu’ils ne soient pas tentés par des coups de force. Sera-t-il
plus entendu aujourd’hui qu’hier ? Seules les suites données
à ses conclusions nous le diront.
6) République Démocratique du Congo et l’Afrique des
Grands Lacs
En février dernier nous faisions état de l’assassinat
de Laurent-Désiré Kabila et de l’avènement de son fils, Joseph
Kabila, à la tête de l’ancien Congo Belge. Depuis beaucoup d’eau a
coulé sous les ponts…
D’abord les enquêtes menées tendent à disculper le
fils dans l’assassinat du père, à faire apparaître une rivalité
entre les soutiens militaires de LDK (Angola, Namibie et Zimbabwe), et
à inscrire l’assassinat dans un complot pro-rebelle sans que les
responsabilités ne soient unanimement déterminées. Seules des actions
en justice pourraient donner une meilleure idée de la position
officielle du gouvernement de Kabila fils, sur cet assassinat.
Ensuite Joseph Kabila a su renouer et développer le
contact avec la Communauté internationale, notamment les Nations Unies
pour le déploiement de la MONUC, et l’Union Européenne pour l’aide
au développement et à la reconstruction dans le cadre de l’aide
humanitaire, sans compter la Belgique et tous les autres partenaires
bilatéraux. Persiste toutefois, le différend international à propos
du mandat d’arrêt international contre Abdoulaye Yerodia, devant la
Cour internationale de Justice, ainsi que l’action contre l’Ouganda
pour actes d’agression et de violation de souveraineté.
La situation politique interne de la R.D.C. n’a pas
beaucoup changé, malgré le remaniement ministériel qui a permis à
Joseph Kabila de constituer son équipe indépendamment des accointances
entre son père et certains membres du gouvernement dont il a « hérité ».
Le dialogue intercongolais n’a pas encore eu lieu, et nul ne s’est
dans quelles conditions il se tiendrait d’autant plus que le pouvoir
en place empêche les rencontres initiées par les partis d’opposition
avec les mouvements rebelles.
Au niveau de la sécurité, le retrait des troupes étrangères
ne se poursuit pas, malgré les rappels de ses exigences par le Conseil
de sécurité dans ses Résolutions 1341
(2001) du 22 février 2001 et 1355
(2001) du 15 juin 2001, citant nommément le Rwanda et l’Ouganda.
Une résurgence des affrontements est même à relever, retardant ainsi
la poursuite du déploiement de la MONUC dont le mandat a été prorogé
pour une année (juin 2001 à juin 2002) avec la Résolution
1355 (2001). Joseph Kabila souhaite pour sa part que ce déploiement
ne se fasse plus sur les lignes de démarcation interne à la R.D.C. et
séparant les territoires sous contrôle gouvernemental de ceux contrôlés
par les rebelles, mais sur les frontières mêmes du pays, notamment
celles avec l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi… Cette solution
pourrait convenir à ces Etats parce qu’elle leur permettrait de voir
leurs frontières sécurisées, mais elle suppose… un retrait total préalable.
Il est difficile de croire en sa faisabilité, en l’état actuel de la
crise, avec les nouvelles accusations portées par le Rwanda contre le
Gouvernement de Kinshasa qui, aux dires de Kigali, soutiendrait toujours
les rebelles dans le Kivu. En interprétant les allégations de Kigali,
il faut en déduire que l’occupation d’une partie du Kivu ces
derniers mois ne lui a pas permis d’atteindre ses objectifs de sécurisation
de la zone… Pourquoi était-elle donc nécessaire ? Et, surtout,
pourquoi se poursuit-elle?
Hors de la R.D.C., la situation est identique, mi-figue
mi-raisin.
Au
Rwanda même, des incursions rebelles se poursuivent, avec des
affrontements ponctuels. Tandis qu’en Ouganda, les dernières élections
ont ravivé la flamme d’une opposition armée dont l’arme est
l’attentat. Plusieurs voitures piégées ont déjà explosé ici et là.
Au Burundi, l’opposition armée menace gravement la stabilité du
pouvoir de Buyoya. Bujumbura a failli être prise, n’eût été le
soutien militaire de Kigali qui, là aussi, agit dans le cadre de la sécurisation
des régions environnantes !
Roland
Adjovi
30 juin
2001
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