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Union Africaine

 

par Roland Adjovi (30 juin 2001)

 

En septembre 1999, à l'initiative du dirigeant libyen, un sommet extraordinaire des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'Organisation de l'Unité Africaine, Organisation continentale, s'est réuni à Syrte pour étudier le projet libyen en vue de la création d'une fédération d'Etats africains. Ce projet est à l'origine de l'Acte constitutif de l'Union africaine ou Traité de Lomé parce qu'il a été adopté lors du sommet de Lomé en juillet 2000. L'actualité de cette évolution des relations internationales africaines, le Traité étant entré en vigueur le 26 mai dernier, nous amène à nous poser deux questions. La première a trait à la nature de la nouvelle institution ; la seconde aux difficultés juridiques résultant de cette entrée en vigueur, en rapport avec l'O.U.A. essentiellement.

 

1-. La nature de l'Union Africaine née du Traité de Lomé

 

Contrairement au projet libyen, il ne s'agit point des Etats-Unis d'Afrique, la fédération dont avait déjà rêvé Kwame N'Krumah en 1963 lors de la réunion d’Addis-Abeba et que la majorité des Etats réunis à ce sommet avait rejeté pour créer l'O.U.A.

L’Union Africaine qui est née avec le Traité de Lomé, consacre la persistance d’une organisation internationale en raison de sa composition et des termes de son acte constitutif.

En effet l’Union est composée d’Etats membres qui sont représentés par les Chefs d’Etat et de Gouvernement, lesquels composent le principal organe de la nouvelle organisation (la Conférence de l’Union, article 6). Or les Etats fédérés ne disposent pas de telles institutions, s’agissant du Chef de l’Etat, n’ayant pas de souveraineté internationale.

De plus l’Acte constitutif stipule parmi les objectifs de l’Union, la défense de la souveraineté de ses membres, la défense de leur intégrité territoriale et de leur indépendance (article 3). De telles dispositions ne laissent subsister aucun doute. L’Union Africaine est bel et bien une organisation internationale à vocation continentale, mais seulement à vocation continentale. Et c’est bien là que se posent les problèmes de ses rapports avec l’Organisation continentale actuelle, l’O.U.A.

 

2-. Des problèmes juridiques résultant de l’entrée en vigueur du Traité de Lomé

 

Le Traité de Lomé a été adopté par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement, organe décisionnel de l’O.U.A. Ce sont donc les cinquante-trois (53) Etats membres de l’Organisation continentale qui ont mis en place la nouvelle institution, l’objectif étant d’accélérer le processus d’intégration et de mieux faire face aux défis que connaît le continent. Toutefois tous les Etats, individuellement n’ont pas signé le Traité de Lomé.

L’article 33 alinéa 1 de l’Acte constitutif dispose que « le présent Acte remplace la Charte de l’Organisation de l’Unité Africaine » : autrement dit l’Union Africaine succède à l’O.U.A., avec une période transitoire qui ne peut excéder un an, nous dit le même article. L’Acte constitutif étant entré en vigueur le 26 mai 2001, l’O.U.A. doit expirer au plus tard le 25 mai 2002.

Or tous les Etats africains n’ont pas ratifié le Traité de Lomé, l’entrée en vigueur étant intervenue « trente (30) jours après le dépôt des instruments de la ratification par les deux tiers des Etats membres de l’OUA » (article 28). Ainsi une organisation simplement régionale succède à une organisation continentale, ce qui ne sera pas sans poser quelques difficultés juridiques.

En effet l’O.U.A. va-t-elle vraiment disparaître ? Car comment expliquer que la volonté des Etats qui ont ratifié le Traité de Lomé puisse mettre fin aux obligations qui les lient en vertu de la Charte d’Addis-Abeba à des Etats qui, eux, n’ont pas ratifié le Traité de Lomé : c’est le problème de l’effet relatif des traités. Il peut, cependant, être valablement soutenu que l’Acte constitutif ayant été adopté au sein de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement (Décision AHG/Dec.143 (XXXVI) dont les décisions s’imposent théoriquement aux Etats membres, tous les Etats parties à la Charte d’Addis-Abeba auraient ainsi donné leur consentement à l’extinction de leurs obligations en vertu de cette Charte. De plus cette procédure respecte les conditions de forme posées par la Charte de l’O.U.A. dans son Article XXXII relatif à l’amendement ou à la révision.

Se posent aussi nombre de problèmes de succession d’organisations internationales plus généralement, comme celui des arriérés dus par certains Etats membres.

Autre problème qui se pose, c’est celui du Sahara Occidental. Il faut rappeler que c’est sa reconnaissance par la majorité des Etats africains qui a permis son adhésion à l’O.U.A. et le retrait du Maroc, par la même occasion. Entre-temps, certains Etats africains sont revenus sur leur reconnaissance de la République Arabe Sahraouie Démocratique (R.A.S.D.). Or, la R.A.S.D. a évidemment et dans son intérêt, signé et ratifié l’Acte constitutif de l’Union Africaine (la R.A.S.D. a signé l’Acte constitutif le 12 juillet 2000, ratifié le 27 décembre 2000 et déposé les instruments de ratification le 2 janvier 2001). Elle continue donc à exister en tant qu’Etat dans le paysage africain notamment, alors même que les dernières propositions au sein des Nations Unies tendent à l’instauration d’une large autonomie au sein du Royaume Chérifien, sans souveraineté internationale.

 

En somme l’Union Africaine constitue une évolution par rapport à l’O.U.A., en permettant une meilleure intégration qui demeure inscrite dans une coopération interétatique ; mais sa naissance soulève des difficultés juridiques qui devraient éveiller la curiosité des internationalistes. Et le prochain Sommet ordinaire de l’O.U.A. en juillet 2001 à Harare, qui sera le dernier, devrait prendre d’autres dispositions transitoires conformément à la Décision du second Sommet extraordinaire de Syrte (alinéa 4 de la Décision EAHG/Dec.1 (V) de mars 2001), lesquelles devront tenter de résoudre certaines des difficultés de la succession.

 

 

Sources :

Centre de documentation de l’O.U.A. où sont publiés l’Acte constitutif de l’Union Africaine ainsi que les différentes résolutions du Sommet de Lomé en juillet 2000, et quelques autres documents récents.

 

 

A lire ailleurs sur Internet :

- Pour une présentation journalistique de l’Union Africaine, lire Sidy GAYE, « Après la naissance de l’Union, ce qui change et comment », Agence Panafricaine de Presse, Dakar 20 avril 2001.

- Pour une analyse récente et en ligne de l’action de l’O.U.A., lire Albert BOURGI, « Voyage à l’intérieur de l’OUA : de la mystique de l’unité africaine à l’outil diplomatique, un réalisme plus fécond », Centre d’Etude Rémois des Relations Internationales, Université de Reims, 2000.

 

Roland Adjovi

30 juin 2001

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